Numéro 8 | 30 janvier 2025 | |
Et si on devenait un peu plus pharmacovigilants ? | |
Dans notre activité de médecine générale, nous rencontrons fréquemment des effets indésirables médicamenteux mais en notifions très peu à la pharmacovigilance (PV).
Pourtant, ces notifications spontanées sont indispensables et la sous-notification est un facteur limitant important dans la connaissance des effets indésirables des produits de santé. Les études sur ce thème sont assez peu nombreuses mais pointent toutes les mêmes facteurs de sous-notification par les généralistes et les autres professionnels de santé de première ligne de soin : absence de déclaration du fait du caractère connu et anodin de l’effet indésirable, méconnaissance de la procédure de notification, complexité de la procédure, doute sur l'imputabilité, crainte d’une charge de travail trop lourde…
Dans le cadre du récent projet de santé publique porté par l’URPS avec le bureau d’études Open Rome, la pharmacovigilance a été retenue comme l’un des axes d’étude pilote. Une étude qualitative envisagée initialement n’a pu être menée, faute de médecins volontaires dans la zone d’étude, mais les recherches bibliographiques et les contacts pris localement et dans d’autres régions permettent d’envisager la pharmacovigilance sous un angle différent, beaucoup plus utile sur le terrain. Il s'agit de voir notre rôle dans la pharmacovigilance comme une « demande d’avis sur une potentielle étiologie médicamenteuse d’un tableau clinique » plutôt que comme une « déclaration de pharmacovigilance ». Cette dernière terminologie donne en effet l’impression de remonter des données sans retour à en attendre, ce qui n’est pas la réalité du travail des services de pharmacovigilance.
Nous restons convaincus que ce sujet est important pour nous tous et qu’il serait intéressant de pouvoir poursuivre ces travaux, afin d’enrichir notre pratique et de participer, pleinement et de façon utile, à améliorer la pharmacovigilance.
Dr Claude Bronner
Président de l'URPS ML Grand Est
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Niveaux et tendance de l'activité virale en région Grand Est | |
(données de la semaine 04/2025)
Comparaison à la semaine précédente
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Selon les dernières données de Santé publique France, on note à nouveau une forte intensification de l'épidémie en région Grand Est comme dans tout l'Hexagone. Cette nouvelle bouffée de grippe, au cœur de l’épidémie, a débuté chez les enfants, surtout les 5-14 ans, dès la semaine 03/2025 ; comme attendu, les enfants étant des acteurs importants de la dissémination de la grippe, l’activité grippale infantile a rapidement entrainé une hausse des indicateurs dans toutes les classes d'âge en ville et à l'hôpital. L’activité grippale est actuellement très intense et qualifiée d’exceptionnellement élevée chez les enfants.
La sévérité de l'épidémie est marquée, avec une activité hospitalière intense, des cas groupés d'infections respiratoires liées à la grippe dans les établissements médicaux-sociaux et un impact important en termes de décès.
Les 3 virus grippaux A(H1N1)pdm09, A(H3N2) et B/Victoria co-circulent.
L’activité post-épidémique de la bronchiolite continue de décroitre et les autorités viennent de fixer la date de fin de campagne d’immunisation contre le VRS au 31 janvier 2025.
Activité toujours stable, et à des niveaux bas, côté covid-19.
Sources :
https://sante.gouv.fr/professionnels/article/2025-dgs-urgent-03-fin-de-la-campagne-d-immunisation-des-nouveau-nes-et
Santé publique France
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Pharmacovigilance en médecine générale | |
En France, la pharmacovigilance est principalement basée sur les déclarations spontanées réalisées auprès des Centres Régionaux de Pharmacovigilance (CRPV), avec une sous-notification connue et documentée. Une des raisons de la sous-notification est la méconnaissance de ce qu’il faut déclarer, du circuit de déclaration et de la structuration de la pharmacovigilance. |
Que faut-il déclarer ?
La pharmacovigilance regroupe la surveillance, l’évaluation, la prévention et la gestion du risque d’effet indésirable résultant de l’utilisation des médicaments. Elle s’exerce en permanence, avant et après la commercialisation des médicaments, et constitue un élément essentiel du contrôle de la sécurité des médicaments. En 2022, l’ANSM a publié un document « Les Bonnes Pratiques de Pharmacovigilance », définissant le rôle des différents acteurs du système de pharmacovigilance. Les médecins sont évidemment en tête de la liste des professionnels de santé impliqués.
Dans ce document de référence, la liste des situations à déclarer est longue et résumée comme « tout effet indésirable suspecté d’être lié à l’utilisation d’un ou plusieurs médicaments, qu’il soit grave ou non, listé ou non dans le résumé des caractéristiques du produit et la notice patient, survenant dans des conditions d’utilisation conforme ou non conforme aux termes de l’autorisation ou de l’enregistrement du ou des médicaments ».
Le champ est donc très large : effets indésirables dans le cadre d’une utilisation conforme, interaction médicamenteuse, erreur médicamenteuse, situation de surdosage, de mésusage ou d'abus, exposition professionnelle, défaut de qualité d’un médicament ou de médicaments falsifiés…
Les professionnels de santé sont également encouragés à déclarer toute erreur médicamenteuse sans effet indésirable, toute suspicion d’inefficacité thérapeutique ou de transmission d’agents infectieux liée à un médicament ou à un produit, bref toute situation que le professionnel de santé juge pertinente de déclarer.
La terminologie « déclaration de pharmacovigilance » et cette longue liste peuvent donner une vision faussée, très « montante » et dans le seul sens du médecin vers le CRPV. Mais le document de l’ANSM insiste aussi sur le fait que les professionnels de santé peuvent s’adresser au CRPV pour toute demande de renseignement. Différents travaux, menés en médecine générale, ont mis en avant l’importance de ce changement d’angle dans la définition de la PV qui doit plutôt être vue comme un échange bilatéral et une « demande d’avis sur une potentielle étiologie médicamenteuse d’un tableau clinique ».
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Comment déclarer ?
Les signalements doivent être réalisés de préférence via le portail dédié du ministère chargé de la santé : https://signalement.social-sante.gouv.fr/
Ils sont alors transmis automatiquement au CRPV du territoire concerné. Selon les régions et les CRPV, d’autres supports de déclaration peuvent être utilisés (courrier, compte-rendu d’hospitalisation, fax, courriel, appel téléphonique).
Le document de bonnes pratiques définit les 4 informations indispensables à un signalement valide :
- un déclarant identifiable
- un patient identifiable
- un ou des médicaments suspectés
- la nature du ou des effets indésirables ou des situations motivant la déclaration.
C’est sur cette base qu’une équipe de recherche normande a mis en place un formulaire simplifié sur le site de l’URML Normandie - www.exercer.fr/full_article/1475 - et communiqué auprès des médecins. Cette démarche a permis, à 3 ans, de multiplier par 3 le nombre mensuel de déclarations et par 2 le nombre mensuel de MG déclarants, tout en conservant la qualité des déclarations.
| Une solution de signalement simplifié de pharmacovigilance comme celle proposée en Normandie vous intéresserait-elle ? | D’autres travaux français ont montré l’efficacité de différentes méthodes pour améliorer les signalements des MG : envoi régulier de courriers électroniques d’information ; formation régulière de pharmacovigilance ; mise en place d’une application mobile ; mise en place d’un outil en ligne ; création de réseau de pharmacovigilance ; visite régulière d’un attaché de recherche clinique. |
Quelques chiffres pour l'année 2023 en France
- 58 996 observations d’effets indésirables médicamenteux enregistrées.
- 31 288 observations ayant un critère de gravité
- Plus de 34 000 réponses aux demandes de renseignements sur les médicaments
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Quels retours attendre de ces signalements ?
Les CRPV insistent sur le fait qu’une déclaration bien faite ne sera en général pas suivie de demande d’information complémentaire, mais donnera lieu en revanche à un retour utile pour la pratique.
Par ailleurs, les CRPV publient régulièrement des bulletins, souvent interrégionaux, d’informations utiles ; en Grand Est, le bulletin « Echos de pharmacovigilance en Bourgogne Franche Comté et Grand Est » émane des CRPV de Besançon, Dijon, Nancy, Reims et Strasbourg.
Tous les bulletins de PV français sont disponibles sur le site du réseau Français des CRPV (https://www.rfcrpv.fr/bulletins-des-crpv/). Ils regroupent en général des alertes récentes, des articles de fond et des cas pratiques.
Sources
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Prolongation de la campagne de vaccination contre la grippe et la covid-19 |
Les données épidémiologiques récentes confirment la poursuite de l’épidémie intense de grippe, entrainant la mise sous tension du système de soins notamment hospitalier et un engorgement des services d’urgence.
Parallèlement, les premières données de couverture vaccinale publiées par Santé publique France ne sont ni satisfaisantes, ni rassurantes.
Au 31 décembre 2024 :
- la couverture vaccinale grippe était estimée à 49,8% chez les personnes âgées de 65 ans et plus, et 22,7% chez celles âgées de moins de 65 ans à risque de grippe sévère ;
- la couverture vaccinale contre la Covid-19 était estimée à 19,8% chez les personnes âgées de 65 ans et plus, et de 7,4% chez celles âgées de moins de 65 ans à risque de Covid-19 sévère.
Toutes ces couvertures vaccinales sont inférieures à celles estimées pour la saisonà la même date. Dans ce contexte, les Autorités de santé ont prolongé la campagne de vaccination jusqu’au 28 février et de nouvelles doses de vaccins ont été mises à disposition par les firmes.
La grippe est épidémique depuis maintenant 7 semaines dans la région : que répondre au patient qui demande s’il est vraiment encore intéressant de se faire vacciner ? On peut dire que, tant qu’on n’a pas attrapé la grippe, il est encore temps de se faire vacciner. Mais il ne faut pas oublier que la protection vaccinale n’est effective que 10 à 15 jours après l’injection… Et donc, vacciné ou non, que c'est plus que jamais le moment de se protéger et de protéger les autres en appliquant consciencieusement les gestes barrières !
Sources :
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Benzodiazépine et immunothérapie
La France reste le deuxième pays européen plus gros consommateur de benzodiazépines (BZD) derrière l’Espagne. Dans le contexte « pharmacovigilance » de ce bulletin, de nouvelles données sur les possibles effets secondaires des BZD ont attiré notre attention.
En effet, une étude récente, menée par les équipes de Guido Kroemer et Laurence Zitvogel à l’Institut Gustave Roussy, révèle une possible interaction préoccupante entre les BZD et les mécanismes de l’immunothérapie anticancéreuse : les BZD pourraient modifier l’immunité et constituer un frein aux immunothérapies anticancéreuses. Les résultats montrent en effet que les patients sous BZD ont une évolution tumorale accélérée et une survie globale réduite, même si d’autres facteurs sont pris en compte.
Face à la consommation massive de benzodiazépines, ces travaux appellent à une vigilance accrue en cas de co-médication avec des immunothérapies, pour ne pas compromettre leur efficacité.
Une raison de plus de faire le point avec les patients sous benzodiazépines.
Source
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Bulletin rédigé par Open Rome pour l’URPS Médecins Libéraux Grand Est.
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