On parle beaucoup des IPA en ce moment : ce sont des infirmiers qui ont fait deux années de formation supplémentaires, pour se rapprocher un peu plus de la compétence d’un médecin.
Les pouvoirs publics y voient une solution au déficit de médecins, les médecins y voient une concurrence déloyale dans l’idée qu’on autorise des personnels formés en 5 ans à rendre le même service que d’autres formés en 10 ans !
Prescription par les IPA : un débat
Les IPA ont le droit de prescrire, dans un cadre contraint. Cadre que veut élargir la loi RIST, en rajoutant stupidement de l’huile sur un feu qui n’en avait pas besoin...
Est-il scandaleux qu’une infirmière en pratique avancée prescrive ?
- Si c’est en accord avec le médecin qui suit le patient, pourquoi pas.
- Si c’est en autonomie totale, c’est une atteinte supplémentaire à la désorganisation et dégradation de notre organisation des soins.
IPA, Asalée et Assistants médicaux
Les médecins libéraux français travaillent en majorité avec peu d’aide en personnel. C’est une spécificité de notre pays qui explique en grande partie les difficultés d’accès aux soins.
Mais s’ils ont peu de personnel, c’est certes parce qu’ils n’en ont pas la culture, mais aussi et surtout parce que les recettes des médecins ne leur procurent habituellement pas les moyens de financer ce personnel.
Les pouvoirs publics ont donc timidement tenté de déployer des solutions, qui ont rapidement montré leurs limites :
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Les infirmiers Asalée sont salariés par une association et viennent passer quelques heures dans les cabinets médicaux partenaires. En juin 2022, ils étaient 123 dans le Grand Est sur 188 sites.
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Les assistants médicaux sont salariés par les médecins et financés plus ou moins par l’Assurance Maladie. On compte actuellement (en décembre 2022) 295 contrats signés + 11 en cours de signature dans le Grand Est et le gouvernement en annonce 10 000 pour 120 000 libéraux dans l’immédiat.
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Les IPA sont susceptibles de travailler en hôpital comme en ville (on compte actuellement 15 IPA exerçant en cabinet libéral dans le Grand Est) et il y aura fin 2023 le nombre affolant de 221 IPA formées et en cours de formation dans la région !
Quel statut et quelles missions pour les infirmiers de pratique avancée ?
L’IPA n’est pas là pour remplacer le médecin mais pour accompagner la prise en charge de patients complexes : éducation thérapeutique, visite à domicile avec appel en télémédecine si besoin, renouvellement d'ordonnances en accord avec le médecin, etc.
Comme toujours, il a fallu écrire le détail dans la loi, avec par exemple l'arrêté d'activité de l'IPA de 2018.
Et surtout, l’IPA peut être salarié par le médecin, mais aussi travailler en libéral.
Et ce modèle économique libéral devient viable avec le nouvel avenant infirmier, qui s’appliquera sous peu : 400 € de forfait annuel (50 par trimestre) par patient confié par contrat. En échange, il faudra justifier au minimum d’un contact trimestriel (dont un en présentiel).
S'ajoute à cela la possibilité d’un « bilan ponctuel,» annuel et de 4 séances de soins infirmiers maximum par an, à la demande du médecin pour des patients qui ne sont pas au forfait. Le soin est à 16 Euros, le bilan à 30 Euros.
La relation IPA/Médecin
Le médecin, ou plutôt LES médecins si l’IPA contractualise avec plusieurs médecins, peut confier les patients de son choix à l’IPA, tout en continuant à les voir sans restriction.
Il va de soi que les 30 euros du « bilan infirmier » donnent du grain à moudre dans la négociation du tarif de la consultation médicale ! Et le problème n’est ni le tarif des IPA ni leur place dans le système de soins, mais celle des médecins.
Les rares médecins et IPA qui travaillent ensemble sont enchantés de leur collaboration et si médecins et infirmiers libéraux manœuvrent bien, cela peut représenter une chance pour la pratique libérale.
Ne nous leurrons pas, en termes de « rendement », un libéral sera toujours plus performant qu’un salarié, qu’il soit médecin ou infirmier, et s’ils travaillent de concert, les patients s’y retrouveront !
En tout cas, ce n’est pas demain que les IPA se multiplieront comme des petits pains sur le territoire, cela laisse le temps aux médecins de s’y intéresser.
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